Alger, une ville trop chère

Alger devient de nos jours, une ville ou il ne fait pas bon vivre, la capitale est en effet classée troisième cité la plus onéreuse dans le monde arabe, et cinquième en Afrique. Aucun aspect de la vie quotidienne n’échappe à ce constat. De la facture de l’électricité aux frais de nourriture, en passant par le prix du loyer et ceux des loisirs – quand ceux-ci existent-. Le salaire du citoyen parait dérisoire, voire tout bonnement ridicule. Déstabilisés par cet état de fait, de nombreux habitants d’El Bahdja recourent quelquefois aux procédés les plus invraisemblables pour assurer leur survie. Le commerce informel, la mendicité, le trafic et la consommation de drogue, l’insécurité sous toutes ses déclinaisons peuvent dès lors, prospérer.

Produits Alimentaires

Alger Produits Alimentaires

Les prix des fruits et légumes atteignent des cîmes, mettant à terre les bourses modestes de ménages qui n’arrivent plus à gérer leurs dépenses quotidiennes. Cette situation est vécue partout en Algérie, mais pas avec la même acuité qu’à Alger. En effet, les marchés et autres commerces d’alimentation générale de la capitale traversent une véritable crise. Certains produits de base sont trop chers et d’autres connaissent une pénurie qui persiste depuis des mois. Les prix affichés sur les produits agricoles et alimentaires sont à la fois terrifiants et irréalistes, suscitant un sentiment d’impuissance auprès de la population prise en tenaille entre le devoir de subvenir aux besoins de la famille et l’incapacité à remplir son couffin quotidien. Cette inquiétude générale vient s’ajouter à la liste des soucis ménagers qui s’accumulent par la faute d’un salaire pour le moins insuffisant.

Il était une fois les fruits

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Il devient difficile d’offrir à sa famille un repas complet et équilibré quand les légumes deviennent inaccessibles. La pomme de terre, qui entre dans la préparation de la quasi-totalité des plats algériens, voit son prix doubler chaque semaine et est cédée généralement entre 45 et 50 DA. La courgette est actuellement vendue à 80 DA, l’oignon à 40 DA et la carotte entre 60 et 70 DA le kilo. La tomate, quant à elle, devient de plus en plus «hors d’atteinte» à cause de son prix fixé à 60 DA et ce prix varie d’une localité à une autre. Nombreuses sont les familles qui écartent cet aliment et se retrouvent contraintes de le remplacer par le concentré de tomate en conserve. Les autres légumes comme la laitue, le poivron et l’aubergine n’ont pas connu d’augmentation importante depuis quelque temps. Le marché des fruits a également été touché par cette hausse épuisante. Ceci concerne même les fruits communs largement consommés par les Algériens comme les pommes qui sont cédées à 300 DAle kilo et les bananes entre 150 et 180 DA. D’autres fruits de saison comme la fraise et la cerise font rêver les consommateurs désireux, mais ne pouvant les approcher, se contentant de les admirer sur les étals. «La manipulation des prix commence chez les grossistes qui changent la valeur des biens agricoles à leur guise», dénonce un commerçant. «Ils monopolisent le marché et font grimper les prix au sommet. Les détaillants se retrouvent obligés de revendre le kilo de pomme de terre a 65 DA s’il est acheté a 55 DA chez le grossiste. Les 10 DA de marge bénéficiaire sont nécessaires à la continuité de nos commerces», renchérit-il.

Spéculation

Certains accusent des réseaux organisés d’agir secrètement sur la marchandise, en faisant main-basse sur les aliments naturels tels que les fruits et les légumes frais, souvent achetés sur pied. Ces produits sont ensuite stockés dans des chambres froides, guettant l’opportunité d’un déséquilibre dans l’offre pour les écouler. «Le budget alimentaire devient lourd. Les marchés et les supermarchés sont assez bien achalandés, mais le citoyen n’arrive plus à toucher à quoi que ce soit sur les étals. Même les marchands ambulants affichent des prix hors d’atteinte. C’est une catastrophe», se désole un père de famille. «Avant, pour 500 dinars, on rentrait chez nous le couffin plein et le sourire large sur le visage. Je suis à la retraite depuis 5 ans et je n’arrive pas à boucler les fins de mois. On ne sait plus où donner de la tête. Parfois, le tarif d’une visite médicale et les frais des médicaments prennent toute ma paie», ajoute-t-il. Les viandes n’échappent pas à cette flambée dantesque des prix. Le kilo de viande d’agneau est vendu à 1 250 DA, tandis que le kilo de viande de boeuf peut atteindre les 1 500 DA dans quelques boucheries de la capitale, obligeant les bourses modestes à se rabattre sur les viandes congelées, plus abordables. Le poulet frais est cédé quant à lui entre 400 et 500 DA/KG. «Un grand nombre d’Algériens oublient progressivement le goût de la viande fraîche, préférant consommer les viandes et les poissons congelés qui restent relativement accessibles pour toutes les bourses», confie le gérant d’une boucherie. Les produits laitiers connaissent à leur tour une hausse importante. Le lait en boite frôle les 100 DA le litre, suite à la pénurie de lait en sachet vendu à 25 DA. Ce dernier se caractérise par son goût repoussant et sa couleur douteuse et est souvent imposé aux consommateurs qui ne peuvent pas se procurer une boîte de lait homogénéisée. La même flambée touche les yaourts, les fromages et les desserts mettant fin aux petites gâteries et aux plaisirs gourmets qui raffinaient la table de quelques familles.

Contrôle absent

La situation se complique pour cause d’absence des services de contrôle des prix qui restent incapables d’endiguer, un tant soit peu, cette dégradation du pouvoir d’achat. D’ailleurs, cette hausse brusque et inexpliquée des prix des produits alimentaires de base poussent, dans certains cas, les jeunes à manifester de manière violente leur exaspération face au coût de la vie et au chômage galopant. «On ne veut plus de cette vie de misère», explique un jeune étudiant. «Ce n’est pas seulement la vie qui est chère, mais c’est aussi les salaires fixés par l’Etat qui sont insuffisants. Avec un Smig à 18 000 DA, on a le sentiment de ne jamais avoir fini de payer les factures», affirme-t-il. En effet la jeunesse et les couches sociales défavorisées semblent être les véritables victimes de cette guerre ouverte contre le pouvoir d’achat. Le Ramadhan, qui arrive à grands pas, nourrit l’angoisse des ménages et promet d’éroder encore davantage les maigres bourses.

Logement

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Les prix de l’immobilier poursuivent leur course effrénée vers le haut dans la capitale, atteignant des seuils intolérables. Depuis quelques années, il est devenu quasiment impossible de louer un appartement ou d’acheter une simple maison sans être confronté à toute une série de problèmes qui empoisonnent le marché immobilier algérois. Ce dernier étale des prix défiant toutes les lois du commerce. En effet, la spéculation domine ce secteur, tirant les prix toujours vers le haut et condamnant le citoyen moyen à errer entre les agences immobilières afin de se trouver un toit.

Qu’il s’agisse de louer un studio ou d’acquérir un appartement, le client se retrouve ruiné jusqu’au dernier sou, avant même de franchir la porte de son logement. Entre l’achat, la part de l’agence traitante et la facture du notaire, les prix exagérés à l’extrême obligent l’acheteur moyen à visiter un grand nombre d’habitations dans l’espoir de trouver moins cher. Les prix explosent littéralement au centre de la capitale. Un studio de 22 m2 est loué à 30 000 DA par mois, dans le quartier du Sacré Coeur. Un appartement F3 dépassera largement les 45 000 DAsur la place Audin. À ce prix, l’intéressé pourrait louer un niveau de villa avec jardin à Birtouta, dans la banlieue sud d’Alger. La folie immobilière prend une autre dimension quand il est question d’acquisition. «Ça devient très amusant de se rendre chez un agent immobilier pour s’informer sur les prix du marché», dit Mohamed Kaci, ingénieur spécialisé dans le bâtiment. Les prix de vente et de location n’obéissent à aucune logique. Les matériaux de construction ne coûtent pas si cher que cela. Le marché immobilier actuel est un commerce malhonnête qui ouvre la porte de toutes les opportunités aux courtiers et aux agents véreux qui manipulent les prix en toute liberté et en l’absence d’un contrôle sévère englobant toutes les activités du foncier. Inutile d’être un expert dans ce domaine pour comprendre que les gens se prétendant agents immobiliers n’ont aucune connaissance des règles. Ils n’ont qu’une idée en tête, vendre plus cher et gagner plus gros», explique-t-il. En effet l’accès au logement reste problématique pour des millions de ménages à cause des tarifs exorbitants des appartements, les prix varient selon l’endroit et le métrage. Ce sont les nouvelles règles du marché. «Le particulier vend plus cher que l’agent immobilier. La commission de l’agence ne dépassent généralement pas les 10 à 20%, contrairement au propriétaire du bien qui n’hésite pas à tripler voire quadrupler le prix afin de faire rentrer le maximum d’argent. C’est simplement un commerce indécent monté sur le dos des personnes qui se lancent à la recherche d’un chez-soi», s’indigne encore Mohamed Kaci, qui encourage les citoyens à refuser ces prix qui ne connaissent aucune limite, afin de réguler le marché. Un logement de type F3 est vendu entre 1.5 milliard et 2.5 milliards, des chiffres qui désespèrent les personnes qui rêvent de posséder un toit aussi médiocre soit-il. L’achat d’une petite villa ou d’un habitat individuel dans un quartier résidentiel devient, quant à lui, un projet inabordable et le rêve chimérique de la plus grande partie de la population. «Les belles villas ont été construites par les riches et pour les riches», indique Mohamed kaci. «Le prix d’une villa située sur les hauteurs d’Alger égale celui d’une résidence en Espagne. ce n’est pas logique et c’est la cause de cette envolée des prix que le citoyen se rabat sur ce qui est le moins cher autrement dit ces carcasses non achevées qui défigurent nos villes et les mauvaises constructions sans papiers vendues au noir», dira-t-il, faisant allusion aux quartiers défigurés qui reflètent l’agression qu’a subi l’urbanisme au coeur d’Alger.

La ruée vers l’or

La vente des biens immobiliers se transforme en un véritable terrain de chasse pour les courtiers, les intermédiaires et les agents incompétents qui faussent les règles du marché en travaillant au noir pour s’emparer des commissions les plus juteuses. Il existe en effet une chaine interminable d’intermédiaires entre le propriétaire et l’acheteur forcés de donner à chacun d’entre eux une part pouvant aller jusqu’aux 100.000 DA, ce qui triple le prix du bien. Interrogé sur ces faits, les propriétaires des agences immobilières accusent les fausses agences et les courtiers qui selon eux, emprunteraient un mode opératoire assez convaincant pour escroquer les gens. «Il y a des escrocs qui connaissent bien le régime foncier. Ils guettent les gens qui possèdent une maison à vendre et proposent de l’acheter. Une fois le contrat signé, ils feront tout pour retarder le payement et poussent le vendeur à rompre le contrat pour l’attaquer ensuite en justice et réclamer dommages et intérêts», raconte Ahmed Benzekri, propriétaire d’une agence immobilière, qui précise, par ailleurs, que la flambée des prix des biens immobiliers est essentiellement due à l’absence de régulation du marché de la part de l’Etat. Il accuse dans la foulée les promoteurs étrangers qui promettent de construire des complexes de rêve et ne mènent pas leurs projets à terme, comme c’était le cas pour le projet d’Alger Médina, qui n’a jamais vu le jour.

Le commerce des nouveaux riches

Le rêve de la richesse s’empare des Algériens qui deviennent cupides et désireux de mener une vie de luxe. Vendre un terrain ou une maison devient une occasion de se remplir les poches au maximum. De nombreux propriétaires s’investissent dans l’immobilier devenu un commerce florissant. Certains vendent leurs gourbis pour acheter des voitures et d’autres vendent des villas pour acheter des appartements qui seront ensuite vendus encore plus cher. Cette situation décourage les citoyens moyens qui abandonnent l’envie d’acheter une maison et se tournent vers les projets de l’Etat. Il faut dire qu’il y a des gens qui attendent depuis 10 ans la réception de leur logement. «J’attends la réception de mon logement depuis sept ans. Je ne sais même plus si mon dossier existe toujours. La vie n’a aucun sens sans logement. On ne peut pas se marier et fonder une famille sans avoir un petit chezsoi. Ce n’est pourtant pas trop demander dans un pays aussi riche en hydrocarbures. J’ai personnellement manifesté à plusieurs reprises. Les promesses ne changent pas, on attend, on espère et finalement rien», se désole un commerçant. Il faut dire que depuis plusieurs années la crise du logement est devenue une véritable réalité sociale à laquelle les Algériens ont fini par s’habituer.

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